Le voilà enfin ce compte rendu de mon 1er trail alpin ! C’est qu’il me fallait récupérer un peu de cette aventure estivale.
En effet, comme chaque année, je me fais ma petite épreuve alternative aux courses habituelles sur route que sont les 10 km, semi et marathons. Bref, je sors un peu de l’athlé. En 2011, c’était l’étape du Tour avec le bonheur de remettre un dossard aux fesses ; en 2012, le triathlon de Paris pour profiter d’un bon bain dans la Seine ; et cette année, j’ai jeté mon dévolu sur mon retour en montagne avec un trail.
Plein le dos
Comme je vous l’ai conté régulièrement, je me suis préparé minutieusement pour aborder cette épreuve sans trop souffrir.
Mais patatra, à J-5, je me fais un tour de rein bien costaud. Une lombalgie s’en suit et les doutes s’installent. Je me balade donc avec une ceinture lombaire et je peine à faire mes lacets. Mais je serai au départ, parole de JC !
4h du mat’, j’ai des frissons
Malgré une petite révision sur 20′ la veille de la course -qui m’aura plutôt apporté une chute de confiance vu l’état de ma foulée due au blocage de mon bassin-, je me lève à 4h du mat’ et m’enfile mon bol d’avoine cuit avec un oeuf, du lait de riz, une banane et du sirop d’agave. Après m’être couché tard à cause des soins (séance de Compex, massage des lombaires et organisation un peu laborieuse, briefing de course, etc.).
6h : on part avec mon pote Didier sur le site pour s’échauffer un peu, car on me dit que ça part très vite, il faut être prêt. Mes jambes semblent mieux réagir que la veille. Les étirements, l’adrénaline et les massages de ma moitié baba font enfin de l’effet.
La pression monte
Je cherche à me rassurer avec les conseils d’Anne Valéro, malheureusement forfait.
Je me pointe comme souvent au dernier moment sur la ligne, et derrière une nuée de
journalistes, je découvre les stars des sentiers avec Kilian Jornet en vedette. Sensationnel ! En « virtuose » (haha !) de la comm moderne, je poste à 4 min du départ une photo de Kilian avec moi ! J’ai senti le téléphone (objet à avoir avec soi obligatoirement, avec sifflet, coupe-vent et minimum 500ml de liquide > boisson of course) vibrer toutes la course… 😀
Revenons aux choses sérieuses et à la concentration qui ne devra pas me lâcher durant près de 5heures.
Mon objectif
J’espère boucler à peu près à 1heure de Kilian et autour de la 3e féminine. Cela correspond à un savant calcul en prenant en compte mon temps sur marathon, une course plus longue et une technicité nouvelle et peu travaillée.
Démarrage bon enfant
Le speaker lance le décompte « 5 » et les coureurs comptent en chœur « 4/3/2/1 » c’est parti !
Je suis dans la course. 16 km/h tout en contrôle dans les rues de Cham’, grosse présence du public malgré l’heure matinale. C’est chaud. A nous les pistes de ski de fond et ses grosses flaques liés à la météo de la veille. Je passe devant la ligne d’arrivée où mon fils Louison a gagné le mini cross samedi.
Ça ne court pas si vite mais je me garde bien d’en rajouter. Je surveille à fond les pulses et m’auto-régule à max 165, soit 10-12 pulsations sous mon max.
Les dénivelés et le technique
Mon dos tient dans les premières descentes. Ma jambe gauche ne se fait pas très souple ainsi que mon bassin, mais la confiance demeure.
Premier ravito à Argentières au km10.8, j’y suis en 45′, pile dans mes prévisions. J’ai déjà mis plusieurs fois la main au bidon en prévention de la suite. Je ne croise pas mon demi-baba ni mes deux garçons. Ils seront plus loin en fait.
Col des Montets
AL et mes boys sont là et semblent surpris de me voir apparaître. Les garçons courent à mes côtés et prennent de suite des nouvelles de mon dos. Je suis ok et ne cesse de sourire. Mon baba est plus loin se rassure aussi.
Les sensations sont toujours aussi bonnes : je prends plaisir à croiser des vaches et je sens cette odeur d’herbe fraîche du matin frais des fonds de vallée. Les souvenirs de mes années de VTT défilent dans ma tête.
Première belle descente
Je ne me sens pas si mal. Mais deux trois « avions » me dépassent à grandes enjambées. Je discute avec un coureur qui me dit avoir fini 5e une année. Serais-je dans le coup ?
Il me précise bien que la course débute vraiment après les Posettes, soit après les 1000m de dénivelé positif et… négatif. Cette descente que j’appréhende et dont on m’a tellement dit qu’elle coupait les jambes. De plus, ma seule expérience de trail à fort dénivelé m’a prouvé que l’encaissement de la descente est primordial.
Vallorcine, un ravito déterminant
C’est là que je dois récupérer un bidon et des gels. Anne-Laure est en place, et au passage je lui glisse un « je me régale » ! Louison court un peu à mes côtés.
Et c’est parti pour 45-50′ de montée. C’est simple : 970m de dénivelé en 4km nous attendent. Je suis costaud, bien sur mes appuis, et tempère ma vitesse au gré de mes pulsations cardiaques. Quelques coureurs me dépassent, soit armés de leurs bâtons, soit des tout petits gabarits, mais moi aussi j’en double. Le moral et ma concentration sont toujours top.
Sur les bouts moins raides je suis même plutôt fort.
AL : Mon amour, enfin !
Ravito du col, je passe mon tour car j’ai encore des réserves. Je suis depuis 20′ derrière Mathéo Jacquemoud (vainqueur de la Pierra Menta en ski alpinisme et détenteur du record de l’ascension AR Chamonix-Mt Blanc en 5h05. Un gamin de 22 ans…).
Les Posettes
Sur les aiguillettes des Posettes, le pied alpin me manque cruellement. Quel manque de vivacité dans les enchaînements, il faut mettre les mains, le pied à gauche à droite. Sauter sur un rocher, prendre cette trajectoire plus qu’une autre. Je suis un peu paumé et me raidit inconsciemment. Mes épaules me tirent comme si j’avais un guidon entre les mains. Un hélico reste 3 minutes à ma hauteur, je lui envoie des coucous, il me remercie par des courants d’air terribles !
LA descente arrive
Enfin ! Que dis-je : Au secours ! Elle est monstrueusement technique. Des arêtes, hyper raides. Je suis à la rue.
Sur les fesses parfois pour ne pas tomber. J’ai beau essayer de me motiver de bien respirer rien n’y fait. Deux trois quatre coureurs me dépassent… Ma jambe gauche est raide raide raide. Je fais tout sur la droite, aucune souplesse. Je me bloque et perds de l’énergie.
Les rondins de bois, les fameux… diable qu’ils sont glissants. Je suis trop prudent. Je n’arrive pas à me lâcher.
Mon Dieu, que la montagne est belle
Je garde le moral malgré tout et lève mon nez, car les paysages sont fantastiques. Rien que ça c’est le bonheur !
La 2e partie de la descente est moins pentue, et se traduit par une succession de virages en épingle. Le pilotage bike me revient. Seulement je butte souvent et la malléole se raidit…
Vraiment, 2 mois de prépa en IDF s’avèrent trop faibles pour le col des Posettes. A mi-course, j’étais 37e… à 17′ des premiers. Là, l’écart s’est creusé. Je perds 13′ supplémentaires dans la descente.
Quand la course commence
Me voilà enfin en bas. Du plat, un sol facile… dur quand même pour les jambes, mais j’ai encore confiance, ça va revenir vite. Dans ma tête raisonnent encore les mots suivants : « la course commence à Tré-les-Champs, soit à 10 km de l’arrivée. »
Km 32, j’y suis et retrouve ma famille au ravito. Ambiance géniale.
AL : Effectivement, pour les suiveurs, ce lieu est splendide.
Nous nous attardons sur la jolie terrasse ensoleillée d’une petite auberge. Un chanteur joue du Charlie Winston, du Bashung, c’est cool. Je me prépare à filer un bidon fissa. J’ai la pression quand je vois l’allure à laquelle déboulent les premiers ! JC passe sans stopper, il n’est pas blessé, il tient le choc. Ouf !
Des encouragements si chaleureux
Les gens sont très présents sur le parcours, et tous, tous applaudissent. Une vraie osmose. On ressent une authentique empathie ; les gens semblent avoir un vrai sens de l’effort dans cette vallée ! Les garçons me boostent, et ma chérie me donne les ravitos. Je me débarrasse des manchettes et des gants (on arrive sur le balcon sud). Le soleil + les 1000 m de dénivelé jusqu’à l’arrivée sont maintenant à mes pieds… Que la force soit avec moi.
J’attaque et ça ne répond pas…
Je suis de plus en plus raide sur la cheville gauche. On continue de me doubler. La 2e féminine… Suis-je dans les 50 comme je l’ai espéré ?
Ok, je suis en crise, il me faut faire marcher la tête maintenant. Je reprends un gel, je bois et continue en marchant, car la pente est raide. Je commence à me sentir un peu écœuré. Pas facile non plus la gestion de la bouffe. Ouh la la, ça devient compliqué cette affaire, et clairement l’expérience sur ce type d’épreuve me fait défaut.
Les passages techniques en montée comme en descente deviennent un calvaire. Je n’arrive plus à lever les jambes…
Je vois que d’autres souffrent aussi. Les km passent très lentement. La montée vers le ravito de la Flégère est vraiment, vraiment très très dur.
Actionner le mental
Ça faisait très longtemps que je ne m’étais retrouvé en situation de dépression énergétique comme ça… Allez faut avancer.
Je croise Grégory Vollet, un ex biker qui finit 3e l’an passé et a abandonné cette année. Il m’encourage et me dit que c’est plus vallonné jusque l’arrivée. Malgré ces supers single tracks, je suis médiocre.
Mon cœur ne monte plus du tout et le chrono, lui, défile. Je peux encore faire pas loin des 4h30. Ça serait finalement honorable. J’entends le speaker et vois la ligne. Piouu… qu’elle est haut perchée, à 1 km de l’arrivée (ici 1 km c’est près de 8′).
Mes enfants, ma chérie et les copains des Étoiles sont là
Ils me donnent la force d’en finir. Je retrouve des jambes pour marcher vite voire courir. Mon sourire revient. Le bonheur monte (lui aussi !).
Mon demi- baba chérie est à quelques encâblures de l’arrivée et je ne peux retenir quelques larmes. Je passe la ligne heureux comme tout en regardant le Mont-Blanc se présenter devant moi.
4h32’52’’. 50e et 6e vétéran…
Mon sentiment ?
Je suis heureux avant tout, mais sportivement, je suis mitigé. En soi, avec les conditions d’approche de la course (jetlag, manque de sommeil, dos), c’est plutôt un bon résultat, mais je suis tout de même un peu déçu. J’ai beaucoup appris aussi. Je sais où je peux très clairement gagner du temps ou non, plutôt ne pas en perdre. Et comme je suis, disons, revanchard…
AL : Et tu dois bosser sur quoi pour améliorer ton temps ? Tu comptes revenir l’an prochain ?
Déjà avoir mon corps à 100% au départ. Optimiser mieux les jours avant la course que cette année. Faire un ou deux trails alpins avant. Gérer mieux les gels sur des épreuves de plus de 4 heures pour éviter l’écoeurement.
Bref, vous avez compris, ne cherchez plus où je serai fin juin l’an prochain pour mon épreuve de l’été !
Retrouvez plus de détails sur la course de JC sur le site du marathon du Mont-Blanc
Tu sais donner envie ! Bravo JC, encore une fois pour la course et pour les jolis mots qui nous font rêver. Il faut aussi féliciter l’intendance et les supporters, si c’est pas de l’Amour ça… !?
Très sympa JC ce récit de course …. ça donne très envie, même si l’on comprend que l’on ne peut se lancer dans ce genre de défi sans une certaine expérience déjà et une prépa rigoureuse.
Bravooo pour cette belle course bien gérée malgré les doutes et difficultés .Quelle Belle place 50e , ça le fait sacrément bien sur ce marathon là !! ;-))
Ce parcours je l ai fait une fois mais rien que tu lire je me souviens de toutes ses difficultés…et je te l avais faire des trails en ile de france est tellement loin de ce parcours ! La descente après le col de la posette est vraiment technique et mérite un entrainement particulier. En tout cas, tu as géré au mieux la forme du jour et sur que l année prochaine tu trouveras ça roulant comme kilian :)))
Merci Sophie, en 2014 tu viens aussi ?
bravo pour cette belle course … je suis bien loin de pouvoir rivaliser avec toi et ça même avec 100% de mon corps au départ !!!!
beau chrono et bel effort global
Superbe récit JC ! Merci de nous avoir fait partagé tout ca !
J’espere que ton dos va mieux !
Bravo pour ta préparation si minutieuse et pour ta course !
Un enorme bravo a louison pour son cross !!
A bientot
adrien
Ça pourrait être sympa !! Le plus dur sera l entrainement pour ne pas trop souffrir le jour J.
Félicitations pour ce très beau récit et cette belle performance JC !!!
Wouah, voilà qui fait rêver … Bravo pour cette perf avec ces embûches pré-course !! C’est impressionnant !
Et bravo à l’autre demi baba pour ce soutien infaillible 🙂
Beau compte-rendu qui fait rêver et me rend nostalgique….
L’année dernière je faisais mon premier trail alpin « initiatique » en Suisse à Verbier 29 km et 2600m de D+ …J’ai pris une sacré claque. J’en ai grave chié mais pris plein les yeux … et j’ai découvert que le plus dur c’est pas les montées mais tenir sur 10 km de descente…:
http://app.strava.com/activities/12854795
C’est clair, qu’il faut manger du cailloux alpin pour se faire les pieds !
Tu es un peu déçu mais c’est quand même une sacrée perf…Bravo !
et bien t’en a eu pour ton argent !
Quand je te disais qu’en région parisienne il fallait oublier les descentes techniques…
Merci pour ce récit très honnête, les détails. Un vrai article de blog en fait !
Et ce qu’il y a de bien avec la course à pied c’est que quel que soit le chrono final, tout le monde en chie 🙂
Bravo au sportif mais aussi bravo à la rédactrice en chef et la chef opératrice, les photos sont superbes. Bonnes vacances
Une belle aventure familiale ! Dommage pour le dos ! Moi je dis qu’il va vite falloir se venger 🙂
Quelle volonté ! Toutes les sensations étaient au rendez-vous, du plaisir à la douleur. Et enfin l’aboutissement et le bonheur !
Bravo pour cette course, et merci pour ce CR très détaillé que je viens de lire depuis la plage de Palombagia. On n’a pas tes coordonnées pour éventuellement se voir Samedi ?? Tu as mon adresse mail dans ce post non ?
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Très beau récit, malgré les soucis que tu as eu à ta toute fin de préparation tu fais la un très belle course et je pense que tu as énormément appris 😉
Maintenant il ne te reste qu’a prendre ta revanche 🙂
A bientôt !! 🙂
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